Situé dans la Mézoucée, une région du monde aisément introuvable, le Keskonsmar est un pays de Cocagne cocasse, complètement patrie en sucette.

Ses autochtones, les kismars, forment une fédération de joyeux lurons. Bulbeux, blairs, kodèques, ouilles, bouffeurs et biturés développent une société atypique, pour qui s’y frotte, entièrement basée sur le rire. Ils sont parvenus à bâtir une improbable civilisation du rire, aussi florissante qu’extravagante.

Pourquoi rions-nous ?

Il y a 500 ans émergeât un volcan aussi désopilant qu’absurde, le Piton Monty, le seul au monde à propager du protoxyde d’azote, ou gaz hilarant. Objet de culte chez les kismars, il est le générateur naturel d’une bonne humeur endémique. 

Le Piton Monty, la montagne responsable de ce joyeux bordel. Indubitablement, elle a une forme de cul.

Arriva juste derrière l’homme providentiel, Luc Oche. Il fonda le Keskonsmar. C’est l’histoire d’un mec du peuple, un sans dent, un casse-toi pauv’con… Qui parvint au pouvoir après s’être fait connaître comme saltimbanque. Le trublion devint un politique après avoir été un comique, contrairement au parcours classique des politiques qui deviennent ensuite des comiques. Sa révolution kismare posa les bases institutionnelles et socio-éducatives d’un autre genre de république bananière. Celle-ci donne le sourire. 

Luc Oche, le fondateur du Keskonsmar. Toute ressemblance avec une personne ayant existé n’est absolument pas fortuite.

Comment rions-nous ?

Avoir de l’humour s’apprend, le temps qu’il faut. Les kismars ont fait l’école du rire. C’est le nom d’un système éducatif qui, de la maternelle aux plus prestigieuses écoles supérieures (L’école des Hautes Études en Calembours ou l’École Nationale d’Amuseur à Kalembourg, Sciences-Pots à Bourg-Lagueul) enseigne autant l’art d’être drôle que l’indispensable auto-dérision. L’aptitude à rire de ses propres travers exige une force d’âme, tout comme elle révèle son ouverture aux autres. De nature généreuse les kismars ne rechignent pas à donner à rire, mais boudent, par contre, le rire gratuit. Le rire est un aimable moyen de désamorcer les mauvaises situations, encore ne faut-il ni blesser ni patauger dans le mauvais goût. Pierre Desproges disait qu’on doit rire de tout mais pas avec n’importe qui. Le Keskonsmar diverge. Ici on s’efforce de rire le plus possible avec tout le monde. C’est ce qui fait l’unité du pays.

Entrée de Sciences-Pots, l’une des 3 plus prestigieuses grandes écoles du pays.

Avoir faim fait passer l’envie de rigoler. C’est pourquoi les kismars bénéficient d’une généreuse allocation, allouée pour leurs besoins élémentaires et éviter le travail alimentaire. Elle fut imaginée par Luc Oche, afin que les kismars se consacrassent proprement à la révolution. Avec plusieurs siècles d’avance, le Keskonsmar instaura le revenu universel, appelé le revenu subversif d’amuseur. Le RSA est financé grâce au pétrole de la plaine Auzasse et de la mer d’Ouille. Ce dispositif providentiel est aussi générateur d’une bonne humeur endémique. Serait-il transposable en France où l’on a pas de pétrole ? Avec des idées, pourquoi ne pas imposer une partie des colossales plus-values qui sont réalisées en Bourse ? Alors la Bourse ou la vie ? Tobin or not Tobin ? C’est une autre question…

L’humour des mots nous guide

 « L’humour des mots nous guide » est la devise officielle du Keskonsmar. Les kismars rafolent des jeux de mots : anagrammes, calembours, contrepèteries, faux proverbes, allographes, boutades… les possibilités foisonnent d’avoir le mot pour rire. Les doubles sens humoristiques pullulent dans le parlé kismare, déconcertant le non-initié cherchant à suivre une conversation locale. Les kismars s’en amusent beaucoup avec les touristes.

Le Keskonsmar développe un univers articulé à partir de jeux de mots et en particulier de calembours. Ces derniers affublent ici tous les noms de lieux, les gens, les bêtes, les moins bêtes, les plantes, les activités… tout ce qui peut s’appeler. Même entre eux, les kismars associent leur prénom au nom de famille, sur le mode bien connu des « Monsieur-Madame ont un fils » (ou une fille). Le service d’État civil permet même de se faire rebaptiser plusieurs fois au cours d’une vie !

Un peu de vocabulaire. La toponymie est l’étude du nom des lieux géographiques. Elle a été entièrement revue et corrigée à la révolution kismare pour accompagner le changement de régime (bananier), dans ce qu’il est communément appelé ici : le grand calembourdage. Depuis les jeux de mots, c’est une folie, colorent la terre, les lacs, les rivières, c’est le décor du Keskonsmar.

Vous trouvez ce type de grand baptême général extravagant ? Une aventure similaire se passa en France, avec la révolution de 1789. Un peu d’histoire. De 1793 à 1814, 3 000 communes françaises ont été renommées pour principalement gommer les références à l’ancien régime (pour le coup vraiment bananier) : le christianisme, la royauté, la noblesse… Ces changements de noms ont été faits dans le plus grand sérieux, en devenant parfois risible quand, par exemple, Grenoble devint Grelibre. Dans un registre grivois (plus « sans culotte ») Bourg-La-Reine ou Choisy-Le-Roi changèrent aussi de nom. Bourg-La-Reine devint Bourg-L’égalité et Bourg-Le-Roi s’appela Bourg-La-Loi (démarche qui, quelque part, s’éloigne des idéaux révolutionnaires). A l’inverse, en plein dans la thématique de l’égalité des droits, Jouy-Le-Comte fut remplacé par Jouy-Le-Peuple. Ah ! Ça ira.

Les kismars ne font pas que dans les bons mots. Joignant le geste à la parole, ils mettent en vie de fous concepts. De la Sangria Familia à la tour Nevis, du Feka-Katsu au Yapata-Thai, des Arts Kaiques aux Arts Souilles… Les kismars sont de fieffés farceurs, mais aussi de sacrés bosseurs, déterminés et riches de suites dans les idées. Leur univers connait peu de limites si au final ils peuvent en rire.

Rira bien qui vivra le dernier

Aaaah, Ha ! Ha ! Mais qu’il est bon de rire ! Ha ! Ha ! Ha !

Ça fait du bien rien que de le lire… Ha ! Ha ! Ha ! Ha !

Et qu’il est bon de vivre au Keskonsmar ! Le pays détient le record mondial de la production individuelle de dopamine, d’endorphine et de bonne mine. Ces composés neurochimiques, libérés par les heureux enchaînements d’expirations saccadées, auraient des effets antidépresseurs et antalgiques. Mais ce n’est pas tout. Rire à plein poumons permet de bien se secouer le diaphragme. Cela renouvelle l’air du fond des poumons et expulse les toxines qui auraient la fâcheuse idée d’y squatter. Alors expulsons ! 

C’est pas fini. Rire à s’en dilater la rate, ou s’en faire péter la sous-ventrière, brasse les intestins et favorise la digestion. D’une manière générale les kismars sont persuadés que le rire renforce leurs défenses immunitaires. Ils vont encore plus loin en jouant sur les mots. Rire de bon cœur réduirait les risques cardio-vasculaires. Rire à gorge déployée préviendrait des angines. Rire à pleines dents éviterait de les perdre, à condition de ne pas rire à s’en décrocher la mâchoire, etc…

Et qu’il est bon de rire ensemble! Les rapports sociaux s’en trouvent apaisés et conviviaux. Les kismars se regardent d’un bon œil plutôt que le nombril. Autant dire que les conflits se résolvent ici plus pacifiquement qu’ailleurs, pour convenir à qui reviendra le dernier pot de Nutella bradé à 30 %…

Mais tous n’est pas rose… 

… bonbon. Comme dans tous les pays, on s’amuse, on pleure, on rit, il y a des méchants et des gentils.

Il se passe cette chose prodigieuse avec l’espèce humaine. Vous avez beau supprimer la guerre, la faim, la maladie, puis mettre en place un système social avantageux, pour amener un peuple entier à un niveau de vie franchement enviable… Il en restera toujours une partie pour estimer ne jamais en avoir assez, ou en mériter plus que les autres. 

Dès lors ils ne la jouent plus collectif, ou se servent du collectif pour briller individuellement, comme font pas mal de footballeurs. Le Keskonsmar compte des individualistes avides de gloire et pognon. Rien d’exceptionnel dans l’Humanité. Quelque part cela évite une société trop lisse. On finirait pas s’emmerder.

Situé dans la Mézoucée, le Kesksonsmar est longuement resté fermé au monde extérieur. La faute à de mauvaises expériences avec des colonisateurs espagnols, portugais, anglais, français, puis américains et même soviétiques ! Ils étaient venus avec l’idée saugrenue d’apporter une meilleure civilisation, leur protection, une nouvelle religion et Dieu sait quel autre prétexte encore. De plus, et même s’il on dit que plus on est de fous et plus on rit, Coluche (ou Luc Oche, je ne sais plus) a  précisé que plus on était de fous et moins il y avait de riz. A ce titre, les kismars ont longtemps ri cantonnés. Aujourd’hui les kismars sont enfin ouverts aux visiteurs étrangers, à condition qu’ils respectent leurs cultures, sans rire !

Cette fripouille de Christophe Colomb en personne fit un bref séjour ici. Toute ressemblance avec un personnage fictif est volontaire.

Et puis il y a les autres, ces fourbes voisins d’en bas… Les bien-nommés… Barbants! Les barbants ne rient pas, il ont la gélastie en berne. A leur décharge, ils sont génétiquement  indifférents au gaz hilarant. Il n’empêche, ils se sont toujours montrés prodigieusement rasants. De bonne guerre, barbants et kismars ont connu de nombreux conflits et une certaine rivalité subsistent entre les deux communautés. 

Glossaire des jeux de mots préférés au Keskonsmar


Anagramme

Permutations de lettres qui forment un nouveau mot : Coluche donne Luc Hoche, par exemple…


Allographe

Suite de lettres à prononcer l’une après l’autre : FLMNH, LHOOQ, GPTQBCOPIDQKC, etc…


Boutade

Mot d’esprit qui joue sur le paradoxe « Mon Dieu, délivre moi de la religion ! »


Calembour

Jeu de mots basé sur l’homophonie (mots qui se prononcent de la même façon) ou la polysémie (mot ayant plusieurs sens) 


Contrepèteries

Phrase changeant de sens, après permutation de lettres ou groupes de lettres. Le double sens est très souvent grivois « Il est arrivé à pied par la Chine »,  » Il a un tennis prévisible »,


Faux proverbe

Pastiche de proverbe « Bien mal acquis ne profite qu’après » Coluche. « Bien mal au cul ne profit jamais » Pierre Desproges. « Bien mal acquis ne profite jamais qu’à ceux qui sont assez malins pour ne pas se faire épingler » Pierre Dac.

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